Un quatrième Walery photographe : Walery Mroczkowski dit Ostroga Mrouk
18 décembre 2017Avec la contribution de Jean Catherine
Tenir un blog est un exercice d’écriture passionnant qui requiert temps et énergie. C’est aussi une manière d’échanger avec des lecteurs qui parfois se font connaître, pour commenter, critiquer ou apporter leur contribution, ce qui n’est pas le moindre intérêt de l’échange, et une vraie gratification dont j’ai déjà dit ici le bénéfice. Le mode de consultation de la Toile, par les moteurs de recherche, crée des surprises et relance parfois des sujets anciens.
Un lecteur du blog à Trouville, Jean Catherine, généalogiste à ses heures, m’a écrit pour me signaler que dans un de mes billets, publié le 13 mai 2014, j’avais fait une confusion entre deux photographes d’origine polonaise, confusion qui peut s’expliquer par la relative ressemblance entre les deux noms en tous cas aux yeux et à l’oreille de quelqu’un ne maitrisant pas la langue polonaise : OSTROGA et OSTROROG. Mais aussi parce que Ostroga avait Walery comme prénom tandis que Ostrorog avait fait de Walery son pseudonyme. Photographe à Menton et Trouville, Walery Mroczkowski dit OSTROGA Mrouk ne devait pas être confondu, me signalait Jean Catherine, avec le photographe de la reine Victoria, Stanislas Julien Ignace OSTROROG dit Walery.
De Walery, j’avais parlé à propos d’une carte postale photographique représentant Menelik II, roi des rois d’Éthiopie.
Les recherches que j’avais menées alors pour identifier l’auteur de cette carte, signée Walery, Paris m’avaient conduit sur la piste de deux Walery, père et fils, qui avaient adopté le même pseudonyme (voir Walery 1 et 2). Leur patronyme était OSTROROG et non OSTROGA puisque, reprenant les informations données par Yves Lebrec, j’avais moi-même repris l’erreur consistant à confondre les deux.
Mais en réalité, et pour finir, c’est un troisième Walery qui est le véritable auteur de cette image. Je ne savais pas si bien dire en parlant en 2014 d’histoire rocambolesque. De son vrai nom Varsavaux, il était également photographe et avait, en achetant le studio photographique du dernier Walery, usurpé en quelque sorte ce pseudonyme qui était à l’époque une marque lucrative. Mais ce Walery-là n’avait en fait aucun lien de parenté avec les deux premiers Ostrorog (ni, bien sûr, avec Ostroga). Je le confirme : j’ai rencontré son petit-fils, qui lui-même cherche à démêler la réalité de la vie de son grand-père. J’en parlerai une autre fois.
Je réponds bien volontiers à la demande de Jean Catherine qui souhaite que soit rectifiée ou précisée l’information au sujet donc de ce quatrième Walery photographe : Walery Mroczkowski dit Ostroga Mrouk, qui fut l’ami de Bakounine. Je le fais d’autant plus volontiers que son intervention intervient exactement en même temps que deux autres échanges avec des amis et correspondants du blog, qui m’amènent à vouloir en reprendre le fil, un temps négligé. On notera aussi la présence indirecte d’Élysée Reclus.
En attendant, je laisse la parole à Jean Catherine, qui est aujourd’hui l’invité du blog.
Walery Mroczkowski dit Ostroga Mrouk
Né à Kiev en 1840, d’après son acte de décès, Walery MROCZKOWSKI (l’état civil oublie le W) commence des études de médecine à Kiev, puis intègre l’école militaire polonaise de Cunéo. Après s’être illustré lors de l’insurrection polonaise de 1863, il est contraint à l’exil. Après un séjour en Suisse, il fait la rencontre de Bakounine et le rejoint à Ischia. Il devient l’amant de la princesse Zoë Soumarokoff (Sumarokov) également exilée et membre active de la première internationale nouvellement créée. Fidèle aux idées de l’anarchisme, le couple vit en union libre et a deux enfants.
En 1871 il s’établit à Menton et ouvre un studio de photographe. Par la suite il partagera son année entre Trouville l’été et Menton l’hiver. La signature est W. M.OSTROGA, le M étant l’initiale de son nom et Ostroga son pseudonyme durant son activité en Pologne. Bakounine, dans une lettre qu’il lui adresse le nomme affectueusement « Mrouk ».
L’ainé des enfants Félix après avoir réussi son concours à Centrale en 1888, obtient son diplôme d’ingénieur en 1892. Suivant la voie de ses parents et les idées de leurs amis, il vit en union libre avec Jeanne la fille d’Élysée Reclus. Leur fille Yvonne est connue pour ses livres pour enfants. En 1897 suite au décès de sa mère et de sa compagne, il devient compositeur et sera directeur du philharmonique de Genève. Le 1er octobre 1889, Walery meurt à Paris. Le corps est transporté à Menton, et inhumé au cimetière du Vieux-Château.
Les personnes intéressées par le sujet peuvent consulter la généalogie de W. Ostroga sur le site pierfit geneanet, et éventuellement comparer avec la famille Ostrorog et ainsi constater qu’il n’y a pas de parenté. Également la page Wikipedia fort détaillée qui vient d’être créée.
J. Catherine
La Société de géographie de Paris conserve quelques tirages d’Ostroga, prénommé selon leurs notices Valérien.
P.S. (24/12) : Jean Catherine m’écrit à propos du terme « usurpé » que j’ai choisi d’utiliser à propos de Varsavaux : « S’il a acheté le fonds de commerce de Walery, le nom commercial lui appartient et il est donc justifié à l’utiliser. ». Dont acte.
Do you know where the studio in Menton was situated?
Hélas non.